Saint Seiya Inferno Universe

Chapitre 13 : Le peuple insoumis

  • - 108 !, s'écria le médecin en retirant la dernière plume de métal du corps du Spectre. 108 fragments de métal dans son corps ! Et il vit encore !

Dans une petite chaumière de bois située dans le centre de la ville de Troie, le petit groupe de Spectres attendait depuis maintenant une heure le verdict du médecin troyen. Waltraute était restée auprès de celui-ci pour l'assister dans sa tâche, tandis que Gladius surveillait l'entrée de la petite habitation.

Les autres Spectres, quant à eux, discutaient déjà d'un plan pour pénétrer dans le Palais du Roi Malek, l'usurpateur Perse qui avait capturé la cité et la dirigeait d'une main de fer.

Au milieu de cette assemblée spectrale se tenait une jeune femme d'une vingtaine d'années, qui parlait un troyen ressemblant fort au grec traditionnel, mais dont certaines syllabes différaient ou signifiaient tout simplement autre chose.

Heureusement pour les Spectres, ils comptaient parmi leurs rangs un troyen de naissance, qui, bien que sourd, réussissait à traduire les paroles de la jeune fille par l'intermédiaire de Ganymède.

La Chimère, connaissant le Spectre des Érinyes depuis cinq ans déjà, le rencontrait de temps en temps dans la cité de Smyrne, et les deux hommes avait su nouer le contact à l'aide de leurs cosmos. Ganymède pouvait ainsi écouter, penser les mots de la jeune troyenne et les transmettre à Eckhär sans que celui-ci ne perde un mot des conversations des autres Spectres.

  • - Il y a environ 6 mois, racontait la jeune femme, une immense flotte à envahit la plage aux abords de la ville tandis que des milliers de soldats ont surgit de la plaine orientale de notre Royaume. Nos forces furent vaincues en un instant et notre armée se replia donc dans l'enceinte de la ville où, pendant trois mois, les armées perses se battirent sans réussir à prendre la ville.
    Nos greniers étaient plein de victuailles et nous pouvions largement soutenir ce siège pendant au moins un an. Mais en une nuit, les armées Perses réussirent à entrer dans la ville par je ne sais quel sortilège. La ville plongea dans le chaos et le massacre, devenant un immense champ de bataille... J'ai perdu ma mère et mes trois frères cette nuit-là...

La jeune fille éclata alors en sanglots, devant les yeux peinés des Spectres assis autour d'elle. Seul Eckhär se leva et s'approcha d'elle, la dévisageant de ses yeux gris-bleu avec une intensité incroyable, ce qui calma aussitôt la jeune femme qui se sécha les yeux avant de reprendre son récit, mais cette fois-ci en ne lâchant pas Eckhär des yeux.

  • - Le lendemain, toutes nos forces avaient été anéanties. Les Soldats Perses réunirent l'ensemble de la population sur la place centrale de la ville, où le Roi Malek apparût. Il avait une voix puissante et extrêmement terrifiante, si bien que beaucoup des troyens ont tremblé au son de sa voix. Il nous a dit que la famille royale troyenne avait refusé de se soumettre à son autorité, et que par conséquent elle avait été massacrée. Il nous a ensuite invité à nous soumettre sur le champ si nous ne voulions pas subir le même sort, mais la population refusa de se soumettre et une émeute eût lieu, avec un nouveau massacre... Depuis, une poignée de troyens se réunissent en secret afin de lutter contre l'envahisseur Perse. Ils étaient une dizaine au début, aujourd'hui ils doivent être une centaine tout au plus.
    Si vous avez besoin d'aide, commencez par contacter ces hommes...
  • - Où pouvons-nous les trouver ?, demanda Gladius sans perdre de vue la rue désormais déserte.
  • - Vous ne les trouverez pas, Spectres, mais eux vous trouverons, fît le médecin en sortant de la petite pièce où Lokus se trouvait.
  • - Comment va-t-il ?, demandèrent les Spectres avec inquiétude devant le visage déconfit de Waltraute.
  • - Il est dans un état critique, répondit le médecin sans cacher son pessimisme. Il a reçu des centaines de morceaux de métal dans tout le corps dont certains ont touché ses organes vitaux, sauf miraculeusement son cœur. J'ai réussi à stopper l'hémorragie mais ses plaies sont toujours ouvertes... Je vais devoir les refermer avec un tison s'il veut avoir une chance de survivre, mais la douleur sera telle qu'il risque d'en mourir.
  • - Dans ce cas, c'est moi qui vais cautériser sa plaie, fît Gladius en fermant la porte de la chaumière. Nous avons perdu assez de temps comme ça et nous avons besoin de Lokus en pleine forme pour réussir notre mission. De nous tous, je suis le seul qui soit capable de maîtriser le feu et je serai sans doute plus précis qu'un simple tison. Laissez-moi essayer.
  • - Hors de question !, s'exclama Waltraute en dévisageant le Buffle, ce ne sont pas tes pouvoirs qui le sauveront de quoi que ce soit !
  • - Tu n'as pas confiance en moi ?, demanda Gladius sur un ton de défi.
  • - Pas une seule seconde, persifla la Daphné.

Les deux rivaux se regardèrent de travers, les poings serrés prêts à frapper, mais Gladius n'était pas d'humeur à se laisser emporter pour une simple querelle de ce genre. La vie de son ami en dépendait et il devait à tout prix l'aider. Le Buffle avança vers la chambre de Lokus, mais Waltraute s'interposa, l'empêchant de passer en faisant barrage de son corps.

  • - Ecoute-moi bien, Waltraute de Daphné, que tu sois frustrée par notre combat, je m'en fiche royalement, mais que tu m'empêches d'aller aider Lokus, qui est notre ami à tous les deux, par simple jalousie, je ne le tolère pas. Tu veux montrer que tu es une Spectresse ? Tu veux ta revanche ? Alors laisse-moi l'aider et écarte-toi !

La Spectresse passa par toutes les couleurs sous le coup de la colère et son poing droit se chargea d'éclairs sous les yeux effrayés du médecin et de sa jeune fille. Le regard de ces innocents troubla la jeune femme, ainsi que le regard inquisiteur de ses autres frères d'armes.

  • - Très bien, accepta finalement la Daphné, mais si jamais il ne survit pas, ce sera TA faute et je te tuerai sur-le-champ.

La jeune Spectresse bouscula alors violemment le jeune homme et sortît de la chaumière en trombe, sans son armure. Ganymède sortît à son tour afin de la surveiller, tandis que Gladius entra dans la chambre de Lokus, respirant un grand coup pour ne pas succomber au stress qui l'envahissait.

Il trouva la Panthère torse nu, le corps percé de toute part, la respiration faible et haletante, le visage trempé de sueur. Pourtant, malgré cela, Lokus était éveillé, regardant Gladius avec la même combattivité et détermination qui le caractérisait depuis toujours, ce qui rassura un peu le Buffle qui s'agenouilla au chevet de son ami.

"Je suis certain qu'il survivra", pensa l'Étoile Terrestre de la Corne, "un tel homme avec une telle volonté de vivre ne peut mourir pour de simples blessures contondantes. Ô Hadès, donnez-moi la force de guérir cet homme !"

Eraste, le frère de Lokus, se trouvait également présent au chevet de son jumeau, observant avec inquiétude et honte celui qu'il avait tant injurié et envié depuis plus d'un an, maudissant sa destinée autant que la vie de son frère.

  • - Que se passe t-il ?, demanda Eraste en regardant le visage fermé du Buffle.
  • - Je vais devoir cautériser les plaies de ton frère avec mes flammes, Eraste. Il va falloir que tu le tiennes fermement sur le lit car la douleur sera telle qu'il risque d'y rester. Mais avant, je dois avoir la permission de ton jumeau...

La Panthère regarda tout à tour son frère et Gladius, respirant toujours aussi faiblement. Ses yeux changèrent soudainement d'expression, passant de la détermination à l'acceptation de son destin. Lokus acquiesça lentement la tête en signe d'assentiment.

Gladius fît apparaître une fine flamme sur son index et y concentra son cosmos afin de rendre la flamme aussi droite et fine que possible. Eraste, lui, se prépara à tenir son frère, les larmes aux yeux.

  • - Si tu ne te sens pas capable de faire ça, Eraste, je peux toujours appeler mon maître...
  • - Non, fît Eraste sur un ton dur, je suis son frère, et c'est à cause de moi qu'il est comme ça. Fais ce que tu as à faire, je tiendrai le coup, mais fais vite, qu'il souffre le moins possible.
  • - Je te le promets, souffla Gladius en se concentrant sur la première plaie de la Panthère.

Le fauve émit un rugissement de douleur qui ébranla la petite chaumière troyenne et qui résonna à travers toute la cité, stoppant les passants l'espace d'un instant. Gladius refermait une à une les plaies de la panthère, maintenu par Eraste qui fermait les yeux pour ne pas assister au carnage.

Lokus ferma également les yeux, sans pourtant cesser de crier. Chaque brûlure que lui infligeait le jeune Gladius lui meurtrissait le corps et son cœur battait de plus en plus vite à chaque fois qu'une plaie se refermait. La Panthère respirait de moins en moins bien et ne tarda pas à perdre connaissance.

  • - GLADIUS !, hurla Eraste paniqué. IL NE RESPIRE PLUS !

Mais le Buffle ne pouvait cesser de soigner ces plaies, aussi il intensifia son cosmos et tenta de le faire passer par les plaies avant de les refermer. Eraste eût alors l'idée de concentrer son cosmos au creux de son poing et de l'envoyer dans la poitrine de son frère, le faisant bondir de son lit en essayant de faire repartir son cœur.

Soudain, Waltraute entra en trombe dans la pièce et se joignit à Eraste, tandis que Gladius continuait son office, comptant dans sa tête les plaies qu'il lui manquait à refermer.

Lokus ouvrît alors soudainement les yeux en inspirant un grand coup, au même moment que Gladius finissait de refermer la dernière plaie de celui-ci.

  • - Tu as réussi, Gladius, murmura Lokus en souriant à son ami, tu m'as sauvé.
  • - Tu aurais fait la même chose pour moi, fît Gladius d'une voix faible, maintenant repose-toi. Waltraute, Eraste, veillez bien sur lui.

Gladius sortît de la chambre le teint pâle, sous les applaudissements du petit comité spectral ainsi que du médecin et de sa fille. Mais le jeune Spectre n'avait pas la tête aux honneurs, aussi il sortît de la petite chaumière respirer un peu. Après quoi, il laissa le contenu de son estomac se déverser sur la place, avant d'être rejoint par son maître Nergal qui étouffa un rire en voyant son jeune apprenti dans un tel état.

  • - Et bien, Gladius ! Reprend-toi ! Ce n'était qu'un peu de sang et de boyaux ! Tu connaîtras pire dans ta carrière de Spectre !
  • - Sans doute, Maître, répondit Gladius en se relevant, mais j'espère que ce sera des boyaux de Perses, et non ceux d'un ami...
  • - Ce sont les risques du métier, mon jeune ami, et tu t'en es très bien sorti, rassura Nergal en posant sa main sur l'épaule de son apprenti.

C'est alors qu'un homme, sorti de nulle part et encapuchonné, se présenta devant les deux Spectres. L'homme semblait assez âgé de par ses mains ridées et son regard fatigué, mais les deux Spectres ressentaient au cœur de l'esprit du vieillard une force peu commune, avec sans doute une aptitude à user du cosmos.

  • - Bonjour à vous, Spectres, fît l'homme dans un grec quasi-parfait, je suis celui que les Troyens appellent l'Insoumis. Mais vous pouvez m'appeler Dactylos. Je suis le chef des Insurgés Troyens, en lutte contre le Roi Noir, Malek de Bäal. J'ai des informations pour vous et je crois que vous en avez pour moi. Puis-je entrer ?

Les deux Spectres suivirent l'homme dans la chaumière et le laissèrent s'asseoir sur l'une des chaises de bois du médecin. Celui-ci salua le vieil homme avec moult respect avant de partir avec sa fille, prétextant devoir aller chercher des victuailles au marché. Lokus sortît de sa chambre, le regard plein de vigueur, mais le corps encore las, si las qu'il devait être aidé par son frère et Waltraute.

  • - Nous t'écoutons, vénérable Dactylos. Que veux-tu de nous ?, demanda Nergal une fois que Lokus fût assis.
  • - Ce que je veux ? Rien. C'est ce que veut le peuple troyen qui m'a poussé à vous aider à entrer dans la ville. Nous autres, Troyens, refusons toute autorité venant d'un étranger. Vos ancêtres Grecs ont autrefois tenté de monter sur nos remparts sans succès, ainsi qu'une armée venue d'Égypte il y a fort longtemps, mais les Perses ont réussit là où les autres envahisseurs avaient échoué : prendre la ville de Troie. Depuis lors, ces barbares veulent nous imposer leurs règles sous peine de destruction de notre cité, mais nous ne tolérerons jamais que de tels monstres nous traitent comme des esclaves. Aussi, nous avons besoin de votre aide, Spectres d'Hadès. Nous savons que ces Perses sont aussi vos ennemis. Nous savons que vous voulez libérer notre cité de cet envahisseur. Mais avant de nous unir dans la bataille, j'aimerais connaître vos intentions. Pourquoi êtes-vous venus à Troie ? Et pourquoi si peu nombreux ?
  • - La réponse à votre question se trouve derrière moi, répondit Nergal en montrant Eckhär du regard.

Le vieil homme se leva avec difficulté et s'approcha du Spectre des Érinyes, visiblement troublé par le jeune homme. Celui-ci regarda Dactylos sans transparaître aucune émotion, se laissant toucher le visage par les mains usées de "l'Insoumis", qui s'assied profondément troublé, ne quittant pas des yeux le jeune Spectre.

  • - Ce regard... et ce visage... Par tous les dieux !, s'exclama Dactylos. Il ressemble trait pour trait au Roi Tectaphos dans sa première jeunesse ! Comment est-ce possible ?

Gladius s'inclina devant Eckhär en l'invitant à lui servir de bouche. Le Spectre du Buffle raconta alors l'histoire d'Eckhär au vieux Dactylos, qui écouta les dires du Spectre sans dire un mot, ses yeux s'écarquillant de temps à autres devant les révélations que lui faisait le jeune Spectre.

A la fin du récit, le vieil homme observa Eckhär sans dire un mot, réfléchissant un long moment sur ce Spectre qui se prétendait Roi. Dactylos se leva alors et se mît en face d'Eckhär, lui faisant comprendre par signe qu'il voulait converser avec lui seul à seul. Eckhär accepta en hochant la tête, et les deux hommes sortirent de la chaumière, laissant là les autres Spectres et toutes leurs interrogations.

Le vieil homme s'inclina ensuite devant Eckhär et repartit dans l'ombre d'une ruelle, tandis qu'Eckhär rejoignit ses compagnons Spectres. Gladius s'approcha alors de lui afin qu'il puisse transmettre au Spectre ce qu'ils s'étaient dits.

  • - Nous avons l'appui du peuple troyen et je sais où nous devons nous rendre : le Palais Royal. Les Insurgés ont prévu d'attaquer le palais dans environ une heure. Nous en profiterons pour passer les défenses Perses et récupérer Nikiolas. Mais le Palais est vraiment bien gardé. D'après ce que m'a dit Dactylos, les Ameshas sont tous réunis dans la demeure royale. Il va donc falloir les tuer un par un avant de pouvoir atteindre le dernier d'entre eux, Malek de Bäal.
  • - Tu as eu plus d'infos sur lui ?, demanda Waltraute en tenant la main de Lokus.
  • - D'après Dactylos, ce type est l'assassin même du Roi Tectaphos, donc pas n'importe qui, car les Roi Troyens ont apparemment tous une force physique et cosmique non négligeable, qui, selon lui, égale celle d'un Juge.
  • - Nous verrons cela lorsque nous serons confrontés à lui, fît Lokus en se levant pour sortir de la chaumière.
  • - Toi, tu restes ici, lança Nergal en retenant la Panthère, tu es encore trop faible pour faire quoi que ce soit. Tu resteras ici en sécurité et nous reviendrons te chercher une fois la victoire acquise.
  • - Je dois me battre, Nergal, répliqua Lokus sans broncher, ce Rukh est mon adversaire, et je dois l'abattre coûte que coûte.
  • - Nergal a raison Lokus, tu n'es pas en état de te battre, intervint Waltraute d'une voix douce. Reste ici, je t'en prie.
  • - Ma décision est sans appel, trancha sèchement la Panthère. Un Spectre ne se replie pas. Un Spectre n'abandonne pas. Si vous vous opposez à ce combat, je vous attaquerai sans hésiter une seule seconde !
  • - Lokus ! Tu te rends compte de ce que tu dis ??!, s'exclama Gladius avec colère.
  • - Laisse, coupa Nergal sur un ton neutre, il a fait son choix.
  • - Dans ce cas, intervint Ganymède, ne perdons pas de temps. Préparez vos urnes et allons au palais sur-le-champ. Nous avons un peuple et un juge à sauver.

Les guerriers du Sombre Monarque remercièrent ensuite leurs hôtes, qui leurs indiquèrent le chemin le plus discret pour atteindre la place royale. Les Spectres se faufilèrent ainsi à travers les ruelles étroites de la ville, évitant tout contact avec la foule et les diverses patrouilles Perses qui grouillaient à travers la cité.

Ils arrivèrent ainsi sans encombre sur la place royale, où déjà le peuple troyen s'était rassemblé, entouré de gardes perses ainsi que de Soldats des Ténèbres qui encadraient les troupes et contrôlaient chaque personne qui entrait sur la place.

Plus loin se trouvait le Palais Royal, demeure immense et ancestrale, entièrement faite de marbre et soutenue à l'entrée par de multiples colonnes de pierre sur lesquelles étaient sculptés sur une centaine de mètres les rois principaux de la cité de Troie, de Tros le Fondateur à Tectaphos le Bienheureux. Sur la dernière colonne, encore en construction, des sculpteurs esclaves s'efforçaient de sculpter le nouveau Roi de Troie, Malek le Noir, aidés par les coups de fouet de plusieurs geôliers Perses.

  • - Restez sur vos gardes, murmura Ganymède, l'ennemi peut-être partout, même dans la foule...

Les Spectres s'infiltrèrent ainsi dans la foule, leurs urnes recouvertes de draps de tissu pour ne pas éveiller les soupçons, tandis qu'au sommet du palais, une ombre noire se posait sur le parvis de la salle du trône, repliant ses ailes de charognard avant de demander audience au Roi...


Ikhna de Rukh entra dans la salle du trône au moment où le Roi Malek s'apprêtait à aller faire son habituel sermon aux habitants troyens. L'état de l'Amesha suffisait amplement à expliquer ce qui s'était passé, aussi l'Immortel du Malheur s'agenouilla en face de son maître sans dire un mot, attendant les questions de celui-ci.

  • - Tu as tué celui qui t'a fait ça au moins, Ikhna ?, demanda Malek d'une voix autoritaire.
  • - Il a reçu mes Plumes du Malheur, mon Roi. S'il y survit il ne sera plus qu'un déchet.
  • - Tant mieux, fît Malek légèrement satisfait, mais sans ton bras droit ce sera plus difficile de te battre...
  • - Oh que non !, s'offusqua le Rukh. J'ai perdu un bras, certes, mais la nature a cru bon de m'en donner un autre.
  • - Je suppose que les Spectres sont toujours en face de la porte de la ville ?

Ikhna se tût un instant, honteux. Mais le regard inquisiteur de Malek lui fît avouer le "pari" qu'il avait fait avec la Panthère et l'issue de celui-ci. Le Démon du Désespoir ne dit mot, mais ses poings parlèrent pour lui. Malek frappa son disciple de multiples coups dans l'estomac, avant de l'attraper par la gorge et de le lever hors du sol, les yeux remplis de furie.

  • - Je te laisse une minute pour me convaincre de ne pas te tuer !

Mais le Roi Noir serrait si fort la glotte de son disciple que celui-ci ne pouvait qu'émettre de petits sons aigus, ne pouvant formuler un seul mot. Il fallût qu'Oroa de Péri entre dans la salle pour que Malek desserre un peu son étreinte, sans pour autant lâcher Ikhna.

  • - Maître Malek, je comprends votre frustration, fît Oroa d'une voix doucereuse, mais le fait que les Spectres soient en ville n'est pas nécessairement une si mauvaise chose... S'il vous plaît, posez le Rukh à terre, et je vous expliquerai.

Malek de Bäal regarda Ikhna avec des yeux de fou, puis il l'envoya contre le mur de la salle du trône, se tournant vers Oroa tandis que le Rukh retrouvait peu à peu son souffle. Ses yeux se noircirent de haine et d'ombre tandis qu'il porta la couronne royale sur sa tête.

Il invita Oroa à le suivre, laissant le Rukh en retrait, bien que celui-ci suivît tout de même le Démon. Les Trois Ameshas descendirent ainsi une à une les centaines de marches qui les séparait de la bibliothèque Troyenne.

  • - Je t'écoute, Oroa, qu'as-tu en tête ?
  • - Mon Seigneur, je pense que les Spectres vont se servir des Insurgés troyens pour tenter de pénétrer dans le palais et sauver leur chef. Exauçons leurs souhaits.
  • - Et pourquoi ferions-nous ça ?
  • - Parce qu'en entrant dans ce palais, ils trouveront la mort, bien sûr.

Le Démon émit un long rire maléfique en écoutant le plan sournois de sa disciple, puis il se retourna pour faire face au Rukh. Celui-ci s'agenouilla immédiatement en implorant le pardon de son supérieur.

  • - Ikhna, tu m'as vraiment déçu. Tu peux remercier ta comparse de t'avoir épargné la vie... Néanmoins, tu peux encore nous être utile.
  • - Que puis-je faire pour racheter ma faute, ô Roi des Rois ?
  • - Prend ton envol et surveille la place du Palais afin de repérer les Spectres. Une fois ceci fait, tue-les, sauf le Rat et son disciple. Ces deux-là sont responsables de la mort de mon frère, et même si je ne l'appréciais pas, il est de mon devoir de le venger.
  • - A ta place, je prendrais plus de précautions, fît soudain une voix d'outre-tombe.

Les trois Ameshas firent volte-face, regardant avec stupeur et colère le serviteur d'origine numide qui avait osé parler au Roi avec une telle familiarité. Le Rukh voulût se racheter de suite de l'outrage en fonçant sur l'esclave pour le décapiter de sa main gauche, mais une puissante aura noire émana soudainement du corps de l'esclave, dépassant tout ce que pouvait imaginer les Ameshas.

  • - Comment ce simple esclave peut-il avoir une telle puissance obscure ?
  • - Ce n'est pas qu'un simple esclave..., murmura Malek les yeux grand ouverts. SORTEZ DE CETTE BIBLIOTHEQUE !

Les Ameshas furent encore plus surpris par le comportement de leur Roi, qui semblait presque apeuré par un simple esclave. Mais les rétines entièrement bleues de ce dernier et son puissant cosmos noir les convint de laisser le Roi seul avec ce mystérieux individu.

Ils veillèrent donc à laisser la bibliothèque entièrement vide, répudiant tous les serviteurs, scribes et soldats présents. Malek resta seul avec l'esclave et dès que les portes de bois de la salle se refermèrent, le Roi Noir s'inclina avec respect devant le numide.

  • - Votre présence ici m'honore, mais deviez-vous posséder un esclave pour cela ?
  • - Malek, tu sais très bien que notre présence doit rester la plus discrète possible. Et puis, cette enveloppe charnelle n'était pas bien compliquée à posséder...
  • - J'en conviens, mais vous êtes l'un des trois survivants de la précédente guerre contre les Spectres il y a un millier d'années ! Prendre le corps d'un esclave...
  • - ...n'est pas très glorieux, je sais Malek, coupa le Numide d'une voix déformée par le démon enfermé en lui. Mais rassure-toi, c'est provisoire. Je suis venu ici seulement pour t'avertir. Nous surveillons vos faits et gestes quotidiennement, moi et mes deux frères d'armes, Démon de Bäal, et nous avons été déçus par les... prestations de ton frère et de Kazen. Néanmoins, nous avons pu nous rendre compte de la force des Spectres et ceux qui sont venus jusqu'à Troie sont particulièrement dangereux, en particulier le dénommé Eckhär des Érinyes, de l'Étoile Céleste de la Traque.
  • - Avec tout le respect que je vous dois, je ne crains personne.
  • - Ce Spectre n'est pas n'importe qui, Malek. Il est le fils de Tectaphos le Bienheureux et d'une fille de marchand et le successeur légitime pour le trône.
  • - QUOI ???, s'égosilla Malek. Vous voulez dire que les Spectres sont venus mettre l'un des leurs sur le trône ?
  • - Exactement ! Et s'ils y arrivent, la voie qui mène à Babylone sera toute tracée.
  • - Ils n'en auront jamais l'occasion ! Troie est MA ville. Je refuse de laisser ce bâtard prendre ma place !
  • - Je l'espère, Malek. Le Seigneur des Ténèbres serait très mécontent que la cité d'Ilion lui file entre les doigts...
  • - N'ayez crainte, je vais réserver une petite surprise aux Spectres d'Hadès.
  • - Dans ce cas, je te laisse. Tue cet esclave dès que j'aurais quitté son corps.
  • - A vos ordres, Seigneur.

Une enveloppe noire s'échappa alors du numide avant de disparaître dans le plafond de la bibliothèque. Malek s'approcha du numide qui n'eût guère le temps de profiter de sa liberté retrouvée. Le Roi Noir replaça ensuite sa couronne sur sa tête et rouvrît les portes de la bibliothèque, se préparant à recevoir les Spectres comme il se doit...


Les guerriers du Sombre Monarque s'étaient dispersés le long de la place lorsque les portes du Palais Royal s'ouvrirent. Là, un cortège militaire constitué d'environ une cinquantaine de soldats et de dignitaires sortirent et se positionnèrent le long des colonnades, face au public.

Puis, ce fût le tour du Roi Noir. Celui-ci apparût au public sous une robe de soie noir bardée de signes persans, tandis que sur sa tête était posée une couronne à double étage faite de diamants et autre matières précieuses.

Seul Nergal, Lokus et Gladius dévisagèrent le Roi Malek, celui-ci ressemblant trait pour trait au Démon de l'Angoisse Arsalàn qu'ils avaient si péniblement vaincu, au prix du sacrifice de Pirithos de la Fourmi. C'est donc avec des yeux pleins de surprise et de colère que les trois Spectres accueillirent Malek de Bäal, tout comme la population troyenne.

Le Roi Noir avança pourtant au-devant du peuple troyen, prenant place sur une large estrade, où, étendant les mains vers la population et surveillant les alentours, il commença à parler d'une voix forte et autoritaire.

  • - Troyens, Troyennes ! Je vous ai rassemblés ici car une grande menace pèse sur la ville ! En effet, des rebelles, des mercenaires, des serviteurs du Chaos et du Désordre, sèment un peu partout dans la ville, la discorde et cherchent à me détrôner ! Pour cela, ils ont fait appel à des créatures maléfiques, à des soldats d'outre-tombe, des charognards de la vie et de l'espèce humaine, les Spectres d'Hadès !

Il veut retourner les Troyens contre nous... mais ça n'a pas l'air de marcher, pensa Gladius en observant l'absence de réaction de la population troyenne.

  • - C'est pourquoi, poursuivit le Roi Noir, j'ai pris des mesures de précaution ! Aujourd'hui, vos maisons seront fouillées une par une pour dénicher ces rebelles ! Chaque insurgé trouvé dans une maison équivaudra à la destruction pure et simple du foyer pour cause de conspiration contre votre Roi ! Au contraire, chaque rebelle livré à notre autorité vous récompensera de quelques argents ainsi que d'un peu de nourriture !

Les Troyens se mirent alors à huer le Roi Noir, certains protestant de vive voix, bravant ainsi les regards inquisiteurs des soldats et du Roi même. Soudain, le silence se fît devant la parole d'un vieil homme qui tenta de calmer ses concitoyens. Ce vieil homme était le même que les Spectres avaient rencontré un peu plus tôt : le Chef des Rebelles, Dactylos.

  • - Troyens ! Ecoutez-moi ! Et vous aussi, Malek de Bäal....
  • - C... Comment connais-tu mon rang d'Amesha ?, balbutia le Roi Noir surpris qu'un vieillard en sache autant sur lui.
  • - Je le sais... car je suis le Général Dactylos, Commandant de l'Armée Troyenne sous les ordres du Roi Tectaphos le Bienheureux !

A ces mots, la foule d'Ilion s'enhardit et applaudit le vieux général, qui était un personnage emblématique de Troie et de la vie politique et militaire de la cité avant l'Invasion Perse. Le Roi lui-même émit un léger sourire amusé, tandis que les Spectres le regardaient avec stupeur, se demandant pourquoi Dactylos prenait de tels risques.

  • - Ainsi c'est toi l'ancien officier Troyen que j'ai épargné parmi l'état-major et qui a fomenté une rébellion contre mon autorité ? Tu as du cran de te montrer seul sur la place publique ! Tu souhaites mourir ? Ou te rendre peut-être ?
  • - Malek... ton cœur est aussi noir que les ténèbres et ton âme est corrompue par le mal. Si je suis ici, c'est pour mettre fin à ton règne despotique ! Les Troyens sont des guerriers nés qui refuseront ton autorité aussi longtemps qu'un Perse sera assis sur le trône. Tu comptes nous asservir en jouant les protecteurs et en remplaçant les banderoles troyennes par des banderoles perses, en massacrant les derniers représentants de l'armée troyenne, et en faisant à peine subsister nos femmes et nos enfants, mais sache une chose, Malek ! Tu n'es et ne seras jamais leur Roi et nous resterons Troyens dans notre cœur et dans notre esprit !

A ces mots, le peuple troyen s'enhardit de plus belle, applaudissant à grands renforts de cris de joie et d'invectives insultantes contre le Roi Noir. Mais c'était sans compter sur l'ombre noire qui voguait au-dessus de la foule.

Plongeant à une vitesse prodigieuse, l'ombre noirr grossis à vue d'œil et frappa d'un geste souple et précis avant de redécoller dans les airs vitesse grand V. Dactylos laissa alors échapper un jet de sang de sa gorge perforée avant de chuter au milieu de la foule, qui tendît instinctivement les bras pour recueillir ce grand homme tout en laissant échapper un cri d'indignation.

Seuls quelques spectres embusqués dans la foule avaient aperçu le commanditaire de cet acte outrageant, et Gladius enleva d'ailleurs le capuchon qui lui recouvrait le visage, prêt à en découdre avec l'Amesha qui venait de décapiter la rébellion troyenne. Mais une fois de plus, son maître retînt le Spectre du Buffle d'en faire davantage.

  • - Ne cherche pas l'affrontement, c'est exactement ce qu'ils veulent, Gladius. Dactylos savait les risques qu'il encourait alors garde ta colère pour plus tard...
  • - ATTENTION !!!, hurla Lokus en poussant violemment Gladius.

La serre tranchante du Rukh érafla alors la tête du Buffle qui fût violemment projetée en arrière par la Panthère, qui avait bondi sur son adversaire à une vitesse prodigieuse.

Lokus avait même eu le temps de décocher au Rukh un coup de pied dévastateur dans l'estomac avant d'attraper le Rukh par ses ailes et de le projeter contre les pavés de la place royale, maintenant l'Amesha à terre.

Cela avait eu pour effet de sauver le Buffle, mais les Spectres étaient maintenant repérés par le Roi Noir. Celui-ci jeta d'ailleurs un regard plein de cruauté sur la Panthère, qui avait perdu sa cape et son capuchon dans l'embuscade du Rukh, dévoilant son armure brisée par ses précédents combats.

  • - Vous avez mis longtemps avant de vous montrer, Spectres ! Et en plus je tombe sur la Panthère, l'un des assassins de mon frère...

Cette annonce du Roi Noir laissa les Spectres pantois, mais pas autant que l'explosion de cosmos noir délivrée par le Rukh qui expulsa Lokus, Gladius et Nergal dans les airs avant qu'ils ne retombent sur le sol quelques mètres plus loin, accompagnés d'une dizaine de troyens qui, n'ayant pas la force de Spectres, moururent sur le coup.

Ikhna voulût alors se diriger vers les Spectres, mais une dizaine de glaives s'élevèrent bientôt autour de lui, des troyens encapuchonnés enlevant alors leur marques d'anonymat pour se montrer tous en armes au Rukh.

Des centaines de personnes eurent le même réflexe, et bientôt, la place royale fût remplie de troyens en armes. Les Soldats Perses se regroupèrent alors autour des insurgés et tentèrent de les encercler, mais les Rebelles développèrent un cordon de sécurité qui permît aux femmes, vieillards et enfants de quitter la place, non sans panique.

Malek recula légèrement, surpris par l'attaque surprise des rebelles troyens, avant de lancer une vague d'énergie cosmique noire au beau milieu de la foule. Mais le Spectre des Érinyes, se débarrassant également de sa cape, bloqua l'attaque du Roi Noir sur le peuple troyen.

Découverts, les autres Spectres jetèrent à bas leurs capes et plusieurs flashs de différentes couleurs envahirent la place royale, dévoilant les guerriers du Sombre Monarque tous en armure, prêts au combat.

  • - Satanés Spectres !, vociféra le Roi Noir, vous allez payer pour avoir levé le peuple contre moi ! Soldats ! Massacrez-les tous !!!!

Les soldats Perses donnèrent alors la charge sur les Rebelles, tandis que ceux-ci se jetèrent sur le Rukh. Mais l'Amesha se débarrassa de ses assaillants en un seul coup, tranchant les têtes des insurgés qui roulèrent sur le sol.

La Panthère se jeta alors de nouveau sur l'Immortel et les deux adversaires roulèrent à terre, se donnant coups de poings et coup de pieds comme des bêtes enragées. Ikhna décocha néanmoins un coup de pied dans le ventre de la Panthère qui fût éjecté une fois de plus dans les airs, mais Lokus libéra son cosmos et retourna sur lui-même, son poing fendant l'air en délivrant les crocs de son surplis.

  • - PAR LA MORSURE DE LA PANTHERE !!!!!!!

Le Spectre de la Force frappa alors le Rukh en pleine poitrine, mais Ikhna réussit néanmoins à attraper le bras de Lokus, ce qui limita la puissance du choc. Malgré cela, la Panthère qui jaillit du poing du Rukh eût raison de cette maigre résistance et une partie de la place royale se fissura, libérant une pluie de pierres.

Gladius, Nergal, Waltraute, Eraste et Ganymède, quant à eux, se jetèrent sur les troupes perses, massacrant les Orientaux un à un tout en progressant vers le Roi Noir. Celui-ci ne bougea pas d'un pouce, contemplant la bataille qui venait de débuter.

C'est alors qu'apparût Oroa de Péri, de la Nébuleuse Noire de la Tristesse, le second disciple de Malek, tout en armure. Elle portait un casque qui lui recouvrait entièrement le visage, sauf la bouche, et la faisait ressembler à une statue, tant son visage semblait inexpressif.

Son bras gauche était entièrement recouvert de plumes métalliques tandis que le droit était dépourvu de protection, si ce n'est un gantelet de métal, qui s'enroulait jusqu'à son épaule pour se terminer en une unique aile d'oiseau noir, recouverte de plumes tandis que les membranes de l'aile semblaient similaires à celles des chauves-souris.

Enfin, son plastron épousait parfaitement les courbes de son corps en protégeant essentiellement la poitrine et les côtes, rejoignant harmonieusement ses jambes qui, elles, étaient entièrement protégées par un alliage de métal noir et bleu et bardé de fins motifs persans.

La jeune femme regarda amoureusement son Roi dans un regard rempli de mélancolie avant d'intensifier son cosmos obscur, teinté de tristesse et de mal-être.

  • - CHANT DE TRISTESSE FUNERAIRE !!

Aussitôt, l'Immortel de la Tristesse se mit à chanter une étrange mélopée funèbre. Sa voix angélique fit contraste avec la violence des combats qui cessèrent dès que la femme ouvrit la bouche.

Chaque personne alors présente se sentit envahie par la mélancolie et la voix, douce mais puissante de la jeune femme, semblait se diffuser à travers les cœurs. Gladius ressentit même le cosmos de la jeune femme entrer en lui.

Mais la chanson de la jeune femme fût troublée par les larmes de sang que commencèrent à verser de nombreuses personnes, en particulier les simples humains. C'est alors qu'Eckhär des Érinyes intervint.

L'Étoile Céleste de la Traque fît un bond extraordinaire, bondissant au-dessus des troupes perses qui entouraient le Roi Noir en atterrissant devant la Péri, la frappant au visage sans hésiter, ce qui mît fin au chant funèbre de celle-ci.

Malek, quant à lui, regarda Eckhär des Érinyes comme s'il avait vu un fantôme, et, sortant de sa poche un fumigène, il le lança devant lui et disparût dans un nuage noir.

Aussitôt, Eckhär brava la brume ténébreuse en fonçant vers les portes du palais, étouffant la brume à l'aide de son cosmos, mais Oroa de Péri se dressa devant lui, impassible. La jeune femme regarda Eckhär droit dans les yeux et intensifia son cosmos, sans aucun air de défi, laissant son cosmos mélancolique envahir son corps.

  • - Si tu veux passer, Spectre, tu devras d'abord m'affronter dans un combat singulier, lança Oroa d'une voix douce, acceptes-tu ?
  • - Je n'entends pas un traître mot de ce que tu me dis, fît Eckhär impassible, mais si c'est le combat que tu cherches, moi, Eckhär des Érinyes de l'Étoile Céleste de la Traque, je suis ton homme !
  • - T... Tu es sourd ???, s'exclama Oroa surprise, c'est donc pour ça que mon Chant Funéraire ne t'a fait aucun effet...
  • - A nous non plus d'ailleurs !, s'exclamèrent une demi-douzaine de voix derrière Eckhär.

Waltraute, Nergal, Ganymède et Gladius montèrent les marches du palais et rejoignirent Eckhär, laissant derrière eux une trentaine de Perses, blessés ou morts. Les cinq Spectres regardèrent l'Immortel avec méfiance, mais celle-ci ne se sentît nullement offensée.

Les portes du palais s'ouvrirent alors, et Oroa s'écarta du passage, invitant les Spectres à entrer, à la plus grande surprise de ceux-ci.

  • - Mon maître vous attend dans sa demeure, Spectres. Vous pouvez passer. Seul le Spectre des Érinyes m'intéresse.
  • - Tu vas vraiment nous laisser passer comme ça ?, fît Gladius interloqué.
  • - Bien sûr, répondit Oroa, vous ne représentez rien pour moi. En revanche, mon maître a des comptes à régler avec vous. Notamment toi et ton maître.
  • - Vraiment ? Et pourquoi cela ?
  • - Parce que vous êtes les meurtriers de son frère bien sûr.

Nergal et Gladius se regardèrent un instant, comprenant qui était réellement le Roi Noir, mais aussi le danger qu'il représentait, lui qui était du même sang qu'Arsalàn d'Abraxas. Les deux Spectres se tournèrent alors vers leurs camarades pour demander rapidement leurs avis.

  • - Ça sent l'entourloupe à plein nez, déclara Ganymède en se touchant le menton, mais nous n'avons pas vraiment le choix, il nous faut avancer.
  • - Et Lokus ? Et Eraste ?, fît Waltraute visiblement très inquiète, n'allons-nous pas les attendre ou bien les aider ?
  • - Ce n'est pas notre rébellion, Waltraute, répondit Nergal en serrant les dents, et puis Lokus et Eraste trouveront bien le moyen de nous rejoindre. Nous ne pouvons pas attendre plus longtemps. Il ne nous manque plus que l'avis d'Eckhär.

Ganymède toucha alors le front d'Eckhär, mais celui-ci lui indiqua qu'il n'en avait pas besoin, et prît la parole.

  • - Che n'ai pas besoin de connaître vos choix. Faites che que bon vous semble. Moi, che reste ici et ch'aide mon peuple. Ch'enverrai cette femme ad patrès. Che compte sur vous pour la suite les amis. Mais avant toute chose, si che ne vous rejoint pas, che voudrai que vous fassiez une chose pour moi : tuez l'assassin de mon père...

Les autres ne répondirent pas, mais dans leur regard se trouvait la réponse qu'espérait le Spectre des Érinyes.

Gladius, Nergal, Ganymède et Waltraute franchirent alors le seuil du palais royal Troyen, s'enfonçant dans les ténèbres des hautes colonnes ioniques. Eckhär quant à lui se mît en position de combat, jambes tendues et bras près de la poitrine, les mains vers l'avant, prêt à pourfendre l'adversaire.

Oroa, quant à elle, ne bougea pas d'un pouce, son regard vitreux portant sur la place royale, où le sang commençait d'ores et déjà à couler entre membres de la rébellion et soldats du Roi Noir.

Au dessus d'eux, dans un déluge de coups et d'énergies cosmiques, la Panthère et le Rukh se jetaient l'un sur l'autre, rivalisant de vitesse et de force sous les yeux d'Eraste, qui entre deux victimes de ses lames spectrales, assistait impuissant à la lutte entre Ameshas et Spectres, tout en se faisant le défenseur du peuple insoumis, le peuple troyen.